En fin de semaine dernière dans le
journal de Montréal, Denise Bombardier faisait état de la loi 52 sur l’aide à
mourir. Elle affirmait qu’au Québec, il s’agit là du consensus le plus large débattu
à propos de droits humains comme si la mort était ce qui nous réunit le plus.
Le projet de loi sur l’euthanasie au
Québec, projet de loi 52 que l’on nomme aussi – Aide médicale à mourir - vise essentiellement
à faire de l’euthanasie une « question de santé » et donc une affaire
provinciale. De ce fait, cette loi contourne ainsi l’interdiction de
l’euthanasie et du suicide assisté par un médecin, contenue dans le Code
criminel du Canada.
On comprendra qu’il s’agit ici d’une
forme d’expression détournée, d’un langage qui se veut trompeur et qui dirige l’attention
du public dans un bassin si vague d’informations incomplètes qu’il s’y perd.
Pourtant, on nous doit à tout le moins une explication plus substantive et honnête de
ce qui est en jeu, ou peut-être est-ce que l’on doit s’y engager soi-même.
Lorsque les médecins en soins
palliatifs menacent de démissionner à cause du projet de loi 52, cela porte
fortement à croire que l’« aide médicale à mourir » suscite qu’on
prenne le temps, beaucoup plus de temps, pour l’approfondir davantage.
Comment voit-on cela aujourd’hui, à
peine quelques mois après l’adoption de la loi 52 ? Déjà pour certains, on voit
la mort comme une affaire classé et c’est tellement dommage. Encore une fois,
nous donnons à nos élus trop de pouvoir en ce qui a trait aux décisions qu'il nous
appartient de prendre face à notre rapport à la vie, à celles de nos
proches, ou à toute la dimension relationnelle. On oublie alors de pousser plus
loin notre réflexion, et en l’absence de ce regard plus profond envers l’autre,
en l’absence de présence, d’accueil ou de compassion, nous devenons proactifs d’un
discours qui n’est pas le nôtre et derrière lequel on se cache malgré que n’en
comprenne ni la portée, ni le sens.
Pour tout être vivant, la mort est une
réalité inéluctable ; la vie s'achèvera tôt ou tard par un arrêt définitif de l’expérience
humaine. Cet aspect de l'existence, ce passage si on veut, est un des défis les
plus difficiles que la vie nous propose, car nul n’en revient vivant.
La mort peut effectivement sembler
totalement désespérante et absurde à quiconque refuse d'y faire face ou de
l'assumer complètement. Mais pour ceux et celles qui parviennent à accepter
vraiment cette réalité, c'est au contraire toute la valeur de la vie qui s’ouvre
; dans toute sa contenance enfin, toute sa beauté, son infinité.
D'ailleurs, les personnes qui se sont donnés volontairement
la chance ou l’opportunité d’accompagner la fin de vie, en sont revenues pour
la plupart, avec des expériences riches de sens. Sans contredit, elles ont
pratiquement toutes le même discours ; à savoir que c’est en côtoyant la mort
que la vie prend tout son sens. On en vient alors à sentir de façon presque
tangible, toute la valeur de la vie dans ses mains, dans sa voix, dans son expression,
son émotion.
Alors, si nous pouvons développer dans
ce petit bout de vie une relation intègre et vraie, avec soi-même comme avec
les autres, même dans la douleur, c’est qu’on réapprendra vraiment à faire de
la place au présent, aux valeurs humaines d’accueil et de partage. Ce sont nos
relations interpersonnelles, et du coup notre vie toute entière, qui s’en trouvera
changée.
Isabelle
Pitre, Présidente du Réseau des accompagnants en fin de vie
Sources :
Les Québécois et la mort, Denise
Bombardier
Le projet de loi sur l’euthanasie au
Québec, projet de loi 52, Vie-Canada